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L'histoire de Jimmy commence à New York dans le quartier difficile du Lower East Side. C'est là qu'il naît le 17 juillet 1899. Lorsqu'il a deux ans, sa famille d'origine irlandaise déménage pour Yorkville, un autre quartier difficile, un quartier où pour se défendre, il fallait savoir se servir de ses poings comme il le racontera plus tard. Mais Jimmy et ses trois frères ne font pas le poids face à leur mère qui les remettait régulièrement dans le droit chemin avec de bonnes corrections... L'un des meilleurs souvenirs de Jimmy est un voyage en famille à la campagne. Il est stupéfait de découvrir l'existence d'un tel endroit. A la suite de ce voyage familial, il essaie de s'inscrire dans une école d'agriculture, mais après la visite du quartier par un directeur, il n'est pas admis.
A peine âgé de quatorze ans, il exerce plusieurs petits métiers pour subvenir aux besoins de sa famille. Il entre dans le show-business tout à fait par hasard. Un type lui a dit un jour que s'il savait danser, il pourrait participer à un spectacle musical. Every Sailor le fait entrer dans le show-business... et dans une robe. Le premier engagement professionnel de Cagney est en travesti. En 1920, il apparaît dans une comédie musicale. Il y rencontre une jolie danseuse du nom de Frances Willard Vernon. Deux ans plus tard, ils sont mariés. Cela durera 64 ans.
Les jeunes mariés prennent la route et continuent dans le music-hall. Quand Jimmy n'est pas sur scène, il observe les vedettes pour apprendre. La danse l'intrigue et il copie les pas que les autres exécutent. Il devient rapidement un danseur de claquettes renommé.
Le 11 mars 1930, il retourne à Broadway en tant qu'acteur sérieux. Dans Penny Arcade, il joue avec une jeune actrice, Joan Blondell. Al Johnson a vu et acheté la pièce puis l'a revendue à la Warner. Peu après la première de la pièce, Cagney part pour Hollywood. Il arrive à Los Angeles le 11 avril 1930. Pour lui, ce n'est rien de plus qu'un nouveau contrat à honorer.
A Hollywood, Jimmy ne semble intéresser personne malgré ses 1.70 mètre. La Warner signe pour trois semaines : il sert juste à remplir l'écran, les studios de l'époque produisant un film par semaine. Penny Arcade devient Sinner's Holiday et Jack Warner s'aperçoit vite que Jimmy fait finalement plus que remplir l'écran. Le directeur demande bientôt un nouveau contrat ; Jimmy signe pour cinq ans à 400 $ par semaine.
Après de petits rôles, il joue dans le film qui fera de lui une star : The Public Enemy (L'Ennemi Public, 1931). The Public Enemy est le film le plus violent qu'on ait jamais vu et une partie de la violence est réelle. A l'époque, de vraies balles de mitrailleuses était utilisées. Cagney est alors un vrai dur au cinéma. La loi, c'était pour les faibles. Lui, il se servait. Et le public, las de la dépression, se régale de tous ces films. La Warner lui fait faire deux autres films, puis lui accorde du repos. Il retourne à New York pour des congés sans solde. A Times Square, la foule se presse pour The Public Enemy. Partout, on demande des autographes à Cagney. 400 $ par semaine semblent peu alors que certaines stars qu'il cotoît gagnent 125 000 $ par film. Il est lié à la Warner par contrat mais part. Deux jours plus tard, le studio suspend son contrat.
A peine commencée, la carrière de James Cagney semble terminée... jusqu'à ce que les deux films qu'il a tournés sortent. Deux succès. James Warner, qui pense aux profits, fait à Jimmy un nouveau contrat. Son salaire passe de 400 à 1400 $ par semaine. Il part de suite travailler sur l'un de ses meilleurs films, Taxi (Taxi, 1932) avec Loretta Young ; il est aussi bon en dur à cuire qu'en gentil. Dans Taxi, Cagney joue un syndicaliste exalté. Les idées de Jimmy sont les mêmes dans les années 30 : il donne de l'argent pour aider les ouvriers et les mineurs en grève. Il attaque aussi bientôt Hollywood... Il n'est pas tout seul, beaucoup se plaignent des conditions de travail et des horaires. Cagney fonde alors la Screen Actors Guild en octobre 1933. Il en est le vice-président. En six semaines, le syndicat compte 4000 membres et les conditions de travail s'améliorent.
A l'écran comme à la ville, Jimmy reste sûr de lui, provocant et tient bon. Il ne veut pas être cantonné dans les mêmes rôles, il veut se diversifier mais la Warner ne prévoit rien de tel. Il est, en tout cas, avant tout un danseur, tout est chorégraphique chez lui, même les bagarres. En 1933, il peut enfin faire la chose dont il rêvait : une comédie musciale à gros budget, Footlight Parade (Prologue, 1933). Là, le public le voit enfin comme il se voit : en danseur et en chanteur. Le film est un succès. Les fans lui demandent de danser davantage mais il n'y a pas de projet de ce genre. Les rôles de gangster semblent lui coller à la peau. Il fait ensuite équipe avec un vieil ami de Broadway, Pat O'Brien. Ensemble, ils tournent Here Comes the Navy (1934).
Jimmy et Pat deviennent amis. Ils tournent huit films ensemble. Jimmy est fougueux et Pat sérieux, du moins dans les films... En vérité, Pat est extraverti tandis que Jimmy n'est pas très sociable, il préfère lire. Malgré tout, il aime les sorties entre hommes notamment avec Pat et ses amis : Spencer Tracy, Ralph Bellamy... C'est la "mafia irlandaise" : ils boivent, se moquent des studios et des mauvais scripts.
Quand Jack Warner le fait jouer dans plus de films que prévu, Cagney s'en va et le poursuit pour rupture de contrat. Il quitte la ville et laisse son frère Bill, son manager, s'en occuper. Puis il fait ce dont il rêvait : à 5000 km d'Hollywood, il achète une ferme de 40 hectares. C'est une vieille maison dont l'acte date de 1728. Jimmy rajeunit la terre, élève des chevaux et du bétail. 20 ans après le refus de l'école d'agriculture, Jimmy est fermier.
Les poursuites qu'il a engagées contre la Warner aboutissent. Le 18 mars 1936, à la Cour de Californie, Jimmy gagne son procès et la Warner perd une grande star. Peu de temps après, une nouvelle compagnie, la Grand National, l'engage à 100 000 $ par film. Jimmy est content mais cette compagnie ne peut rivaliser avec les grands studios. Après deux films, Bill Cagney renégociait avec Jack Warner. Bill conclut un contrat à 150 000 $ par film, avec un droit de regard. De retour à la Warner, Cagney va tourner ses meilleurs films. En Rocky Sullivan dans Angels with Dirty Faces (Les Angeles aux figures sales, 1938), il affronte une bande de gosses. Les gosses idéalisent Rocky même quand il est condamné à mort. Pat O'Brien doit faire en sorte que le bien triomphe du mal. La scène finale de Jimmy entre dans l'histoire du cinéma... Puis Jimmy donne à l'Ouest un air de bas fonds dans The Oklahoma Kid (Terreur à l'Ouest, 1939) avec Humphrey Bogart.
Jimmy est alors l'un des hommes les mieux payés. Il adopte un garçon et une fille, James Jr. et Casey. A l'été 1940, des acteurs sont accusés d'être communistes. John Leech donne des noms, l'un d'eux est celui de Jimmy. Harry Warner menace de le ruiner... Pendant que Jimmy est en vacances, Bill prépare le retour de son frère. Sa carrière étant menacée, malgré sa peur des avions, Cagney en prend un pour la première fois : Bill a organisé une rencontre entre son frère et le président du Comité des Activités Antiaméricaines, M. Dies. Jimmy avait donné de l'argent pour neuf jeunes accusés à tort de viol ; son chèque s'est retrouvé dans le bureau du parti communiste. Jimmy a dû convaincre Dies : un quart d'heure plus tard, il est innocenté. Mais Bill veut aussi innocenter son frère pour le public. Il dit à Jimmy qu'ils doivent faire un film patriotique.
Alors commence l'écriture de Yankee Doodle Dandy (La Glorieuse Parade, 1942). Jimmy joue le rôle du légendaire chanteur et danseur Georges Cohan. Réalisé par Michael Curtiz, produit par Bill, et avec sa sœur Jean, le film est tourné à partir du 8 décembre 1941, le lendemain de Pearl Harbor. Yankee Doodle Dandy est le plus grand succès de Jimmy et lui vaut son seul Oscar. Après ce film, les opinions de Jimmy ne sont plus mises en doute.
Les Cagney quittent la Warner pour que Jimmy ait des rôles plus variés. Jack Warner dit : "Il verra qu'on a besoin l'un de l'autre." Jimmy devient directeur du Comité de victoire d'Hollywood. Il va aussi dans les bases, pour encourager et divertir les troupes. Les Productions Cagney font plusieurs films. Leur troisième et dernier film est la pièce The Time of your Life (Le Bar aux illusions, 1948). Ils perdent un demi-million de dollars sur le film. La Warner a un script pour Jimmy alors son frère leur dit : "Jim le fera si vous donnez le premier demi-million aux banques." Le retour de Jimmy à la Warner est un succès avec White Heat (L'Enfer est à lui, 1949). Il joue le rôle de Cody Jarrett. C'est son rôle le plus psychotique : un tueur fou, fils à maman. Il improvise beaucoup et se sert de souvenirs de son enfance, notamment quand il a été rendre visite à son oncle dans un asile, pour interpréter son rôle. Ce film est du pur Cagney mais il dit que c'est encore un film bon marché. Il essaie de se débarasser de son image de dur depuis vingt ans. Avec ce film, cette image marque l'esprit d'une nouvelle génération.
Jimmy fait d'autres films au début des années 50. Il travaille alors pour autant de studios qu'il le désire. 1955 est une très bonne année. Il joue dans Mister Roberts (Permission jusqu'à l'aube) avec Henry Fonda et William Powell, travaillant également avec un jeune acteur de la télévision : Jack Lemmon. Cette année-là, il redanse pour la première fois depuis des années. Dès le début du tournage de The Seven Little Foys (1955), ses jambes le font souffrir mais il va jusqu'au bout. En 1961, Jimmy joue dans la comédie de Billy Wilder : One, Two, Three (Un, deux, trois) mais l'âge le rattrape, il est de plus en plus fatigué. 31 ans après ses débuts, la carrière de James Cagney s'achève.
Sans bruit, sans peur, il se retire chez lui où il écrit, peint, s'occupe de sa ferme. Il aime beaucoup les chevaux.
Grâce à ses films, il peut maintenant mener la vie qu'il voulait.
Jimmy est absent de la scène pendant plus de dix ans. En 1974, il y est rappelé pour un hommage en son honneur. Tout Hollywood assiste à l'événement. Il remercie beaucoup de monde, même son ancien patron : Jack Warner. 13 ans loin des caméras, il a toujours le même humour. Si la vie de James Cagney était un film, il finirait avec cet hommage. Ensuite arrive la maladie. Jimmy revient pour deux autres films mais l'énergie n'est plus là. Le dimanche de Pâques 1986, James Cagney meurt.
Le grand public a toujours aimé Cagney. Il lui appartenait. Un enfant des rues qui savait user de son charme. Il était comme la grande ville : dangereux, imprévisible, excitant...