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Juste une question de chance... « I'm just a lucky slob from Ohio who happened to be in the right place at the right time. » Clark
Gable
Le jeune Billy Gable
Sa mère d’une santé fragile et éprouvée par un accouchement difficile meurt d’une épilepsie alors qu’il n’a que sept mois. Ses grands parents s’occupent alors de lui jusqu’à l’âge de deux ans, époque où son père se remarie et où la nouvelle famille ainsi formée déménage à Hopedale (Ohio). La belle-mère de William Jr, Jennie Dunlap, une modiste, est la meilleure chose qui put lui arriver ; elle est très dévouée et il a appris d'elle la force de la tendresse. Il l’affectionne beaucoup et la décrira plus tard comme « la plus tendre personne qu’il a jamais connu ». Son père, lui, est un homme dur et plein d’amertume. Billy est un enfant tout à fait ordinaire, plutôt
terne. Il est toutefois doué pour la musique, jouant du cor d’harmonie
dans la fanfare municipale d’Hopedale. Il joue également dans l’équipe de
baseball de son école primaire. ![]() ![]() ![]() A l’âge de 14 ans, il a dans l’idée de devenir médecin mais finalement à 16 ans, sa seconde année au lycée d’Edinburg achevée, il émet le désir d’aller à Akron, à 60 miles de chez lui, avec un vieil ami, Andy Means, pour travailler dans une usine de confection de pneus. Sa belle-mère persuade son mari de le laisser faire (ce dernier était contre cette idée). A cette époque, Billy s’intéresse ouvertement aux
filles mais intérieurement, il se sent maladroit et
timide. Naissance d'une
vocation
Il adore ce qu’il fait mais un an plus tard il reçoit une lettre lui annonçant que Jennie, sa belle-mère, est mourante. Il retourne alors à Hopedale pour être auprès d’elle. Après sa mort, son père le contraint à venir travailler avec lui sur les sites pétroliers de l’Oklahoma pour lui faire oublier la magie du théâtre. Celui-ci pense que jouer la comédie n’est pas un métier pour un homme costaud et raisonnable mais Billy déteste ce travail qui lui est imposé et déteste vivre dans la pauvreté. Il en restera marqué. Il veut absolument échapper à cette vie-là pour toujours. Il a déjà interprété des bouts de rôles et malgré
des résultats peu concluants, il est sûr de sa vocation de
comédien. Des débuts
laborieux : entre théâtre et figuration
A Kansas City, Billy rejoint une petite troupe
itinérante appelée « the Jewells Players ». Après seulement deux
mois d’existence, la troupe se sépare. Il se retrouve seul à Mutte, dans
le Montana. Il gagne Bend dans l’Oregon en auto-stop et se fait embaucher
sur des chantiers d’abattage pour ainsi amasser assez d’argent pour se
rendre à Portland où il travaille comme vendeur de cravates dans un grand
magasin. Un collègue, Earl Larrimore, s’apprête à rejoindre une petite troupe partant pour Astoria ; Billy se joint à lui. La troupe comprend une jeune comédienne, Franz Dorfler, dont Billy tombe éperdument amoureux. Il lui fait une cour maladroite mais assidue et finalement ils sont fiancés quand la troupe fait faillite peu de temps après. S’intéressant à sa carrière d’une part et le manque d’argent d’autre part font penser à Franz Dorfler et sa famille que le mariage est impossible bien que Franz, comme Billy, soit amoureuse. Billy retourne à Portland où il cumule de petits jobs comme employé d’une compagnie du téléphone ou employé d’un journal. Il prend également des cours de chant.
Josephine lui obtient également ses premiers rôles au cinéma ; la plupart du temps comme extra bien qu'il ait eu un premier vrai rôle en jouant le frère d’Alice Joyce dans « White Man » (1924), et un rôle dans « The Plastic Age » (1925) avec Clara Bow. Malgré cela, Clark se rend compte qu’il a besoin
de plus de finesse en tant qu’acteur et décide de se retourner vers le
théâtre. ![]()
A Clark déjà très soucieux de son apparence, Ria
enseigne les secrets du dernier chic new-yorkais. Elle améliore encore ses
manières et l’introduit dans la bonne société. Cette éducation influencera
à jamais Clark. Des rôles
prometteurs
Lionel Barrymore qui est allé voir Clark dans
« The Last Mile » est très impressionné par les
progrès qu’il a fait (Lionel Barrymore et Clark avaient travaillé quelques
années plus tôt ensemble au théâtre). Il s’arrange pour lui faire tourner
un bout d’essai pour les studios de la Metro pour un film qu’il comptait
mettre en scène : « Never The Twain Stall Meet
». Le bout d’essai est un échec, le film de Barrymore ne verra de
toute façon jamais le jour. Néanmoins, d’autres bouts d’essais attendent
Clark. Ainsi, Darryl Zanuck le teste pour « Little
Caesar » mais ne signe pas de contrat avec lui à cause de la taille
de ses oreilles. Minna Wallis, impresario et sœur du producteur Hal
Wallis, voit le bout d’essai soit disant raté et est impressionné. Elle
conduit Clark à la Pathé où l’on était en train de distribuer les rôles
pour un western à budget moyen : « The painted desert
». Après la Pathé, Minna Wallis persuade William Wellman de faire jouer Clark avec Barbara Stanwick et Ben Lyon dans « Night Nurse » de la Warner. Il joue le rôle d’un chauffeur assez brutal. Etrangement, ce film plutôt médiocre n’est pas distribué jusqu’à ce que Clark se fasse remarquer dans une production de la MGM, plus tard, la même année. L’intérêt suscité par cet inconnu amène la Metro à lui confier un petit rôle dans « The easiest way », film conçu pour Constance Bennett. Clark y est blanchisseur. Son nom est perdu dans le générique mais les studios furent assaillis de demandes de renseignements sur le « beau blanchisseur ». Il enchaîne ensuite avec « The secret six » aux côtés de Wallace Beery et Jean Harlow. La scénariste de « The secret six », Frances Marion, remarque d’emblée le fort potentiel de Clark et demande à son mari, George Hill, producteur du film, de lui donner un rôle plus important que celui qui était initialement prévu pour Clark. Fin 1930 – début 1931, la Metro se vante d’avoir chez elle « plus d’étoiles qu’il n’y en a au firmament » et Irving Thalberg fait signer à leur jeune étoile un contrat de deux ans renouvelables tous les six mois, avec un salaire de 350 dollars par semaine. Pour la première fois de sa vie, à plus de trente ans, Clark peut enfin compter sur un revenu fixe pendant une période de six mois minimum. Les studios lui payent aussi le complément de ses frais dentaires et une opération de chirurgie esthétique pour ses oreilles. La première personne qu’il informe de son succès naissant est Franz Dorfler, son ex fiancée. Toutefois, soucieux quant à son avenir et hanté par la pauvreté passée, il est d’une excessive pingrerie.
Josephine ne demande pas de pension alimentaire et le tribunal ne lui en accorde pas. Néanmoins Clark prend à sa charge le reliquat de ses dettes de son école d’arts dramatiques. Ria Langham devient la deuxième Madame Clark Gable à New York le 30 Mars 1930, un jour avant que le divorce d’avec Josephine ne soit prononcé. Bigame par accident, Clark se voit obligé de se marier une seconde fois avec Ria, en Californie, le 19 juin 1931. Entre temps, la Metro avait prêté Clark à la
First National pour interpréter un rôle de gangster dans « The Finger Points ». Très vite, la presse remarque
le potentiel de Clark et un journaliste écrit qu’ «
une grande vedette est en train de naître ». La MGM semble
toutefois peu se préoccuper des critiques nettement favorables de la
presse en confiant à sa future star le rôle d’un membre de l’Armée du
Salut dans le mélodrame moralisateur : « Laughing
sinners ». Carl Loomis, le personnage interprété par Clark, sauve
l’âme d’Ivy Stevens (Joan Crawford), pécheresse invétérée. C’est une
erreur de distribution que de lui confier ce rôle de jeune premier
romantique, le premier de sa carrière d’ailleurs ; Clark est alors à
l’opposé de l’amoureux tendre que demande le scénario, incarnant davantage
le séducteur primaire à la sensualité agressive.
![]() ![]() ![]() ![]() Le film qui suit s’intitule « The Free Soul ». L’un de metteurs en scène, Clarence Brown, décide qu’ici Clark malmènerait Norma Shearer dans quelques séquences. Il campe ainsi pour la première fois son personnage de séducteur cynique. En pleine période de crise économique, les spectateurs apprécient ce genre d’homme qui ne fait pas le joli cœur avec les femmes. Lionel Barrymore obtient un oscar pour son rôle dans « The Free Soul » mais celui dont on se souvient et qui marque les esprits c’est Clark qui ouvre déjà la voie à d’autres héros tels Cagney, Bogart, Garfield ou encore Raft. Norma Shearer dira plus tard : « c’est Clark qui a rendu les brutes populaires. » Avec douze films la même année, Clark ne passe plus inaperçu, c’est une vedette. Il eut la chance de se trouver là au bon moment, d’avoir une once de talent et un chef de publicité fit le reste. Ce chef de publicité, c’est Howard Strickling. Il jouera un rôle essentiel tout le long de la vie de Clark, ils deviendront de grands amis. Responsable des relations avec la presse, Howard savait tout ce qu’il y avait à savoir sur Clark, choisissant de le divulguer ou de le taire selon qu’il jugeait le moment opportun ou non. Grâce à Howard Strickling, Clark fut salué en 1931 comme la personnalité la plus marquante de Hollywood. On ne peut le comparer avec personne d'autre, curieux mélange de force suave et brutale à la fois. « Red Dust » est le grand succès de Clark en 1932. Jean Harlow est pour la deuxième fois sa partenaire. Leurs scènes d’amour sont percutantes, la sensualité d’Harlow égalant celle de Clark. Une scène où il la découvre en train de prendre son bain va même jusqu’à choquer le public de l’époque. Clark et Jean tourneront ensemble dans quatre autres films. Le dernier, « Saratoga » (1937), ne pourra être achevé par Harlow qui mourut d’une crise d’urémie à l’âge de 26 ans. Peu après « Red Dust
», la Paramount emprunte Clark pour une comédie un peu osée : « No man on her own » avec Carole Lombard, «
ex-baigneuse » chez Mack Sennett et épouse de l’acteur William
Powell. ![]() ![]() L'ascension du
Roi
Moins de deux ans après ses débuts au cinéma, Clark signe un contrat de sept ans avec la Metro moyennant 2 500 dollars par semaine et qui grimpe à 4 000 dollars par semaine à partir de 1935, établissant ainsi un record.
A la surprise générale, y compris la sienne, Clark remporte l’oscar du meilleur acteur pour sa prestation dans la scène du motel où Claudette est à l’abri de la pluie mais pas de lui… On dit qu’il est alors à l’apogée de son art. Décontracté et désinvolte, il cadre parfaitement avec son personnage et l’histoire dans laquelle il rencontre une riche héritière en fugue et avec qui il voyage en autocar puis en autostop depuis New-York jusqu’à Miami. Le film reçut également quatre autres oscars dans les catégories les plus prestigieuses.
Avec la succession rapide de ces deux gros succès que sont « It Happened one night » et « Mutiny on the Bounty », Clark est plus que jamais assailli par les fans qui vont parfois jusqu’à de telles extrémités qu’il a bien du mal à comprendre un tel engouement. « Ce fameux pouvoir que, paraît-il, j’ai sur les femmes, personne ne l’a jamais remarqué quand je jouais à Broadway. J’ignore quand il m’est venu, et je suis bien incapable de l’expliquer. » A la même époque, il devient évident que Clark et Ria ne sont pas faits l’un pour l’autre. On lui connaît plusieurs amantes dont Joan Crawford et Loretta Young, sa partenaire dans « Call of the Wild » (1935), relation de laquelle naîtra une fille illégitime : Judy Lewis. Toutefois, bien que Clark et Ria se séparent en novembre 1935, cette dernière n’est guère disposée à divorcer dans l’immédiat. Il faudra, pour cela, qu’il paye le prix de sa liberté…
En 1936, Clark se voit offrir le rôle de Blackie Norton dans « San Francisco » avec Spencer Tracy et Jeannette MacDonald, actrice de comédie musicale. Le thème évoqué est le séisme qui ravagea la ville de San Francisco en 1906. Il s’agit du premier film catastrophe de l’histoire du cinéma avec la mise en place d’effets spéciaux jamais encore réalisés. Le film marche bien mais plus grâce à la prestation de Tracy que celle de Clark selon les critiques et Clark lui-même qui envie son partenaire d’être capable de jouer n’importe quel rôle avec conviction.
C’est également en 1937, quelques mois après
avoir laissé ses empreintes dans le ciment du célèbre théâtre chinois de
Sid Grauman, qu’une Anglaise l’accuse d’être le père de sa fille de treize
ans prénommée Gwendolyn. Il se serait soit-disant rendu en Angleterre dans
les années 1922 – 1923 sous un nom d’emprunt et se serait fait passer pour
un précepteur. Il s’agit évidemment d’un mensonge mais encore faut-il le
prouver devant le tribunal. Franz Dorfler, son ex fiancée qu’il n’a revu
depuis sept ans maintenant, témoigne en sa faveur : ils étaient à l’époque
tout deux en Oregon. L’accusatrice est finalement inculpée pour
diffamation. Pour remercier Franz Dorfler de l’avoir soutenu, Clark l’a
faite engager dans la troupe théâtrale de la Metro.
![]() ![]() Quand réussite
professionnelle rime avec bonheur personnel
Les années se suivent, les films s’enchaînent : « Test Pilot » (1938), « Too Hot to Handle » (1938), « Idiot’s Delight » (1939) et le succès est toujours au rendez-vous durant cette deuxième moitié des années 30. En outre, depuis janvier 1936, Clark fréquente Carole Lombard, brillante comédienne à l’écran comme à la ville. Plusieurs femmes ont aidé Clark, Carole lui apporte le bonheur qu’il recherche. Cependant, Ria réclame toujours une somme trop importante à son mari pour autoriser le divorce si bien qu’il se voit contraint de rester marié avec elle jusqu’en mars 1939. Durant cette période, la relation extraconjugale qu'il partage avec Carole alimente les scandales, ce qui lui voudra les remontrances de Louis B. Mayer, directeur de la MGM. Ce dernier souhaite impérativement que Clark mette de l’ordre dans sa vie privée pour l’image de la firme, signifiant au passage à l’acteur qu’il est lié à la MGM par un contrat comprenant des clauses de moralité. Dans ces temps-là, David Selznick (dont les
ennuis professionnels et les démêlés familiaux compremettent ses relations
avec les grands studios) vient le voir pour lui proposer d’incarner Rhett
Butler dans le futur « Gone with the wind »,
vaste épopée de la guerre de Sécession. Dans un premier temps, Clark
refuse, pensant ne pas correspondre au Rhett Butler que tout le monde
connaît au travers du roman de Margaret Mitchell et que tout le monde
attend. En outre, il garde en mémoire l’échec de «
Parnell ». Carole le poussant à accepter ce rôle, la production
affirmant qu’elle l’aiderait à divorcer de Ria Langham sur un plan
financier et Selznick se montrant très insistant, il finit par
accepter. ![]() ![]() ![]() Ainsi, il peut effectivement divorcer et se
remarier moins d’un mois après avec Carole, en secret pour échapper à la
presse. Ce mariage ne surprit personne, ils étaient quasiment inséparables
depuis les trois dernières années. ![]() ![]() ![]() A propos du prix qu’il dut payer à la Metro pour
emprunter Clark (le monopole de la distribution et la moitié des recettes
brutes sont cédés par Selznick à la société de Mayer, celui-ci réalise de
cette façon la transaction la plus rentable de toute l’histoire de la
Metro, sans que Clark n’en profite plus qu’il touche toujours ses 4 000
dollars hebdomadaires habituels), Selznick déclara : « Le jeu en valait la chandelle. Je ne connais pas un seul
acteur qui aurait pu incarner Rhett Butler aussi bien que lui. Dans
n’importe quel rôle, Clark s’est toujours révélé convaincant. Il possédait
ce don divin : un tempérament de théâtre, l’art de communiquer avec le
public ; ce sont des choses qui ne peuvent pas s’apprendre ; l’expérience
ne fait que les mettre un peu plus en valeur. Sans cette qualité, point de
vedette. Etre photogénique ne suffit pas ; il faut ce quelque chose
d’indéfinissable que je me flatte de déceler immédiatement chez un
individu. La première fois que Clark Gable est monté sur scène, le public
ne s’y est pas trompé. » ![]() ![]() ![]()
Malgré tout, il est l’un des seuls acteurs à
avoir joué dans trois films ayant obtenu un oscar du meilleur
film.
Dans sa vie personnelle, son mariage avec Carole
est l’épisode le plus heureux. Ils partagent ensemble des plaisirs et
loisirs simples, loin de la foule. Ils apparaissent comme le couple le
plus heureux d’Hollywood. Carole va même jusqu’à abandonner l’univers des
nights-club dont elle raffolait au profit d’une vie plus calme, proche de
la nature. Ils s’installent dans un ranch à Encino, à 45 minutes en
voiture de Beverley Hills. Ils désirent avoir des
enfants. ![]() ![]() ![]() Au début des années quarante, l’acteur confirme
son statut de superstar mondiale. Il tourne auprès de Hedy Lamarr et
Spencer Tracy dans « Boom Town » (1940), de
Rosalind Russell dans « They Met in Bombay »
(1941) et de Lana Turner dans « Honky Tonk »
(1941). Cependant, un terrible choc viendra contrarier cet état de
grâce… Chagrin et
guerre
En janvier 1942, Carole entame une tournée pour l’emprunt de guerre. On dit qu’elle hésite à partir car Clark s’intéresserait à une autre actrice (On parle de Lana Turner avec qui il tourne à l'époque). Pressée de le revoir, elle rentre en avion et non en train. Son avion disparaît près de Las Vegas. Clark se rend sur les lieux, les recherches commencent. Il n’y a aucun survivant. Nous sommes le 16 janvier 1942, Carole avait 33 ans et s’était mariée moins de trois ans auparavant… Clark se sent coupable de sa mort. Présidant le comité d’emprunt, il l’avait encouragée à partir. « Pendant plusieurs mois après la mort de Carole, Clark était comme fou de chagrin » note l’écrivaine Angela Rogers Saint Johns, une amie intime qui rend souvent visite à Clark pendant son deuil. « Je le trouvais chez lui, dînant seul dans la salle à manger, avec, pour seuls compagnons, le chien de Carole et ses chats siamois. Il refusa de changer quoique se soit dans sa chambre qui resta exactement comme elle l’avait laissée. Quand je lui demandais pourquoi ne sors-tu pas ? Pourquoi ne téléphones-tu pas à tes vieux amis, Vic Fleming par exemple ? il répondait simplement : c’est toujours Carole qui appelait quand nous avions envie de sortir » Malgré son immense chagrin, Clark s’occupe de la famille d’Otto Winkler, employé de la MGM, lui aussi tué dans la catastrophe. Il participe lui-même à l’achat d’une maison pour la veuve du publiciste. Au deux tiers du tournage de « Somewhere I’ll find you », Clark disparaît quelques semaines, l’équipe se demandant s’il reviendrait terminer un jour le film. Mais Clark est bien trop consciencieux pour avoir imaginé, ne serait-ce qu’un instant, pareil abandon. Il mènera le film à son terme tout en prévenant dès le premier jour de la reprise du travail qu’une fois « Somewhere I’ll find you » achevé, il arrêterait sa carrière pour rejoindre l'armée de l'air, malgré son âge, en la mémoire de Carole.
A son arrivée à la caserne en août 1942, il
déclare : « Je ne veux ni faire des discours, ni
vendre des bons d’emprunts, ni distraire les soldats. Je veux seulement
devenir mitrailleur sur un bombardier et être envoyé là où on se bat.
» Cependant, pendant sa formation, l’anonymat qu’il recherche
lui ait refusé, assailli par des admirateurs lors de ses déplacements et
poursuivi par les journalistes. ![]() ![]() ![]() Sa formation terminée grâce à sa détermination et de longues nuits blanches à étudier, il devient bombardier aérien malgré sa peur des avions. L’armée le charge, dans un premier temps, de produire des films de propagande où il figure. Entouré de jeunes soldats qui risquent leur vie chaque jour, il supporte mal son régime de faveur et se porte volontaire pour des missions en Allemagne. En tant que vedette préférée d’Hitler, une importante récompense est offerte à qui le capturera. Fort heureusement, avant que quelqu’un n’y parvienne, le commandant William Gable est rendu à la vie civile, paré de la Distinguished Flying Cross et de la médaille de l’air, en 1944. Il retourne alors à Hollywood, sans certitudes sur son avenir. Ses états de service lui valent une admiration et
un respect accru du public. Des foules entières se déplacent pour
l’accueillir à son retour. Si on en croit Eddie Lawrence, agent de
publicité de la Metro : « Richard Cœur de Lion ne
fut pas mieux reçu au retour des Croisades »
Une période
difficile
Sur la lancée de ses succès d’avant-guerre, Clark
tourne pour la Metro toute une série de films médiocres ; mais c’est
surtout sur le plan personnel que les choses se présentent mal. Son élan
et sa bonne humeur d’antan semblent quelque peu jouer aux abonnés absents,
son chagrin est toujours présent. En outre, le traumatisme de la guerre et
la mort de son père le poussent à bout. A bout de nerfs, il tremble
souvent devant la caméra ; il se remet à boire et commence à manger plus
que de raison, au détriment de sa santé. Son regard semble refléter toute
sa tristesse. Il est très solitaire.
![]() ![]() ![]() Le 22 juin 1951, Dore Schary, scénariste engagé à la Metro en 1933 puis nommé chef de la production en 1948, remplace Louis B. Mayer à la tête de la MGM. Schary est confronté à deux problèmes : réduire les frais de fonctionnements des studios et produire de meilleurs films. La solution choisie ? Rendre leur liberté aux membres de la Metro. Les premiers à partir sont des gens comme Mickey Rooney ou Judy Garland, connus pour leur mauvais caractère. Aussi, le contrat de Clark s’achevant en 1954 ne
sera pas renouvelé. Bien que toujours adulé du public, son salaire de 520
000 dollars par an est jugé trop élevé. Ce non renouvellement de contrat
n’est pas plus mal pour Clark, la MGM a tellement changé qu’il ne s’y sent
plus à sa place. ![]() ![]() ![]() Après son départ, ses deux derniers films pour la
Metro : « Mogambo » et «
Betrayed » sont distribués. « Mogambo »,
remake de « Red Dust » avec Ava Gardner et
Grace Kelly, rapporte de telles recettes que la Metro tente de faire
revenir Clark mais c’est hors de question. On dit qu’il envoie son agent
sonder la Metro pour voir ce qu’elle est prête à offrir pour qu'il tourne
un film et ce, dans l’unique but, de décliner ensuite la
proposition.
![]() ![]() Une sérenité
retrouvée
Du jour au lendemain, Clark se retrouve donc acteur indépendant et quel acteur indépendant : il est le plus cher de toute l’industrie cinématographique. La 20th Century Fox est la première à lui faire signer un contrat. Moyennant un pourcentage sur les recettes brutes, il tourne deux films pour cette firme en 1955 : « Soldier in Fortune » avec Susan Hayward et « The Tall Men » avec Jane Russell. Ces deux films d’actions bien rythmés contribuent à rétablir son image de marque.
A la suite de leur union, la vie à Encino est à
nouveau sereine. Clark s’occupe des enfants de Kathleen comme des siens et
Kay, de son côté, n’a d’autre ambition que de rendre son mari heureux. En
1956, Kay fait une fausse couche alors qu'ils espèrent la venue d'un
enfant. ![]() ![]() ![]() Professionnellement, après son expérience bénéfique à la 20th Century Fox, Clark décide de produire lui-même ses films afin d’augmenter sa part de profit. Il fonde la compagnie GABCO et tourne « The King and Four Queens » avec Eleanor Parker. Le film, un western, ne remplit pas les espoirs que Clark avait placés en lui. Aussi, guéri de jouer les producteurs, il signe avec la Warner pour « Band of Angels » (1957) avec Yvonne de Carlo et Sydney Poitier.
Clark commence à peine le tournage de « It Started in Naples » que le producteur Frank Taylor lui adresse un exemplaire du scénario d’Arthur Miller, « The Misfits », sorte de western contemporain. Taylor désire confier le rôle du personnage principal à Clark et s’en expliqua plus tard : « Nous disposons déjà d’une distribution prestigieuse : Marilyn Monroe, Montgomery Clift, Eli Wallach et Thelma Ritter ainsi que d’un excellent metteur en scène : John Huston. Et, à ma connaissance, un seul acteur, Clark Gable, était capable d’exprimer la nature mâle et virile du personnage principal. A cinquante-neuf ans, Gable restait l’image toujours incontestée de la virilité. Si Marlon Brando possède également cette qualité, seules les femmes y sont sensibles, alors que Gable est perçu de la même façon par les hommes et les femmes. C’est que Brando est un mélange de sexualité et de sensualité ; Gable, lui, n’a absolument pas ce côté sensuel, c’est d’emblée, par sa seule présence physique qu’il s’impose comme mâle. »
Marilyn voit en Clark le père qu’elle n’a jamais
eu. Ce dernier qui apprécie la jeune actrice tout en pestant contre son
irresponsabilité dans le travail s’efforce de lui témoigner patience et
gentillesse. Il supporte avec un humour parfois caustique les aléas du
tournage mais cela n’empêche pas que le film soit pour lui une épreuve
physique (il refuse d’être doublé, les températures dans le désert sont
très élevées). Cependant, Clark est heureux, il va enfin avoir l’enfant
qu’il a toujours désiré, sa femme étant enceinte. Il déclare que ce sera
un garçon. La fin du
règne
Quelques jours après la fin du tournage de « The Misfits », le 16 novembre 1960, Clark meurt d'une crise cardiaque à Los Angeles, âgé de 59 ans. Il avait un début de maladie de Parkinson les dernières années de sa vie. Après les honneurs militaires, son corps fut
inhumé au Forest Lawn Memorial Park Cemetery à Glendale en
Californie, auprès de son ancienne épouse Carole Lombard… ![]() ![]() Pour Kay Gable, sa mort est la conséquence des contrariétés qu'il a endurées sur le tournage de « The Misfits » et son entêtement sans bornes à exécuter lui-même des prouesses physiques qu'il n'était plus en âge, ni en santé de faire. Son seul enfant légitime naîtra le 20 mars 1961.
Comme il l'avait prédit, c'est effectivement un garçon nommé John Clark
Gable. En le voyant, Kay a dit : « Il est superbe,
comme son père le voulait. » ![]() ![]() ![]() Depuis la mort de Rudolph Valentino, aucune autre vedette n'avait été aussi sincèrement pleurée que le fut Clark Gable. Il était connu dans le monde entier, qu'il l'avait vu aimer, sourire, se battre, souffrir... Sa démarche désinvolte, son humour et ses airs canailles étaient son image de marque. Sa mort laissa un vide que l'industrie du cinéma n'a jamais pu combler. Comme l'a écrit la journaliste Adela Rogers St Johns : « Le Roi est mort. Il n'a pas de successeur et n'en aura pas. Le titre est mort avec lui. » Entre 1957 et 1961, plusieurs grands noms du
cinéma des années 30 et 40 ont disparus tels Ronald Colman, Gary Cooper,
Tyrone Power, Errol Flynn et Humphrey Bogart mais c’est la mort de Clark,
le « roi d’Hollywood », qui signa définitivement la fin d’une
époque… Son étoile était montée au plus
du firmament de la gloire où elle avait brillé plus longtemps que celle de
n'importe quel autre grand nom hollywoodien. Personne au monde ne connut
jamais, et de loin, une vie et une carrière aussi extraordinaires que la
sienne. En conclusion, ainsi que le disait John Huston : « Ce n'est pas un homme, c'est une institution.
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