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William Clark Gable, appelé Billy Gable pendant toute son enfance, nait à Cadiz, dans l'Ohio, le 1er février 1901, unique enfant d'un fermier et prospecteur, William H. Gable, et de son épouse Adeline Hershelman Gable ; tous deux d'ascendance germanique.
Sa mère d'une santé fragile et éprouvée par un accouchement difficile meurt d'une épilepsie alors qu'il n'a que sept mois. Ses grands parents s'occupent alors de lui jusqu'à l'âge de deux ans, époque où son père se remarie et où la nouvelle famille ainsi formée déménage à Hopedale (Ohio).
La belle-mère de William Jr, Jennie Dunlap, une modiste, est la meilleure chose qui put lui arriver ; elle est très dévouée et il a appris d'elle la force de la tendresse. Il l'affectionne beaucoup et la décrira plus tard comme "la plus tendre personne qu'il a jamais connu". Son père, lui, est un homme dur et plein d'amertume.
Billy est un enfant tout à fait ordinaire, plutôt terne. Il est toutefois doué pour la musique, jouant du cor d'harmonie dans la fanfare municipale d'Hopedale. Il joue également dans l'équipe de baseball de son école primaire.
A l'âge de 14 ans, il a dans l'idée de devenir médecin mais finalement à 16 ans, sa seconde année au lycée d'Edinburg achevée, il émet le désir d'aller à Akron, à 60 miles de chez lui, avec un vieil ami, Andy Means, pour travailler dans une usine de confection de pneus. Sa belle-mère persuade son mari de le laisser faire (ce dernier était contre cette idée).
A cette époque, Billy s'intéresse ouvertement aux filles mais intérieurement, il se sent maladroit et timide.
C'est à Akron qu'il voit sa première pièce de théâtre : The Bird of Paradise. Il est enchanté et se rend en coulisses où il obtient, au bout de plusieurs heures, un travail impayé en tant que machiniste et garçon d'appel. Il a aussi le privilège de donner parfois quelques courtes répliques.
Il adore ce qu'il fait mais un an plus tard il reçoit une lettre lui annonçant que Jennie, sa belle-mère, est mourante. Il retourne alors à Hopedale pour être auprès d'elle.
Après sa mort, son père le contraint à venir travailler avec lui sur les sites pétroliers de l'Oklahoma pour lui faire oublier la magie du théâtre. Celui-ci pense que jouer la comédie n'est pas un métier pour un homme costaud et raisonnable mais Billy déteste ce travail qui lui est imposé et déteste vivre dans la pauvreté. Il en restera marqué. Il veut absolument échapper à cette vie-là pour toujours.
Il a déjà interprété des bouts de rôles et malgré des résultats peu concluants, il est sûr de sa vocation de comédien.
A son vingt et unième anniversaire, Billy hérite de son grand père et se rend avec cet argent à Kansas City. Ce départ n'est pas du tout au goût de William Gable Sr et provoque une brouille de dix ans entre le père et le fils.
A Kansas City, Billy rejoint une petite troupe itinérante appelée the Jewells Players. Après seulement deux mois d'existence, la troupe se sépare. Il se retrouve seul à Mutte, dans le Montana. Il gagne Bend dans l'Oregon en auto-stop et se fait embaucher sur des chantiers d'abattage pour ainsi amasser assez d'argent pour se rendre à Portland où il travaille comme vendeur de cravates dans un grand magasin.
Un collègue, Earl Larrimore, s'apprête à rejoindre une petite troupe partant pour Astoria ; Billy se joint à lui. La troupe comprend une jeune comédienne, Franz Dorfler, dont Billy tombe éperdument amoureux. Il lui fait une cour maladroite mais assidue et finalement ils sont fiancés quand la troupe fait faillite peu de temps après. S'intéressant à sa carrière d'une part et le manque d'argent d'autre part font penser à Franz Dorfler et sa famille que le mariage est impossible bien que Franz, comme Billy, soit amoureuse. Billy retourne à Portland où il cumule de petits jobs comme employé d'une compagnie du téléphone ou employé d'un journal. Il prend également des cours de chant.
En 1924, Franz Dorfler présente son fiancé (bien que le mariage soit compromis) à l'ancienne actrice, professeur d'arts dramatiques, découvreuse de talents et directrice de théâtre Josephine Dillon. Josephine remarque la forte personnalité de Billy et se prend vite d'affection pour lui. Constatant l'intérêt qu'elle lui porte, il rompt définitivement ses fiançailles avec Franz et se marie avec Josephine le 23 décembre 1924.
Avec elle, Clark apprend le plus de choses sur le métier d'acteur qu'avec n'importe qui d'autre. Il a besoin de ses conseils. Elle lui inculque les rudiments de l'art dramatique, améliore sa diction et sa démarche, le débarrassant ainsi de ses allures gauches. Il pose sa voix encore juvénile pour trouver son ton grave et viril qu'on lui connaît. Elle lui achète également des vêtements, lui fait refaire les dents et le persuade, en 1925, de laisser tomber son prénom William et son surnom Billy qui lui est associé pour ne garder que Clark Gable.
Josephine lui obtient également ses premiers rôles au cinéma ; la plupart du temps comme extra bien qu'il ait eu un premier vrai rôle en jouant le frère d'Alice Joyce dans White Man (1924), et un rôle dans The Plastic Age (1925) avec Clara Bow.
Malgré cela, Clark se rend compte qu'il a besoin de plus de finesse en tant qu'acteur et décide de se retourner vers le théâtre.
Après avoir joué dans plusieurs pièces telles que dans le Romeo and Juliet de Jane Cowl, dans le remake de Madame X par Pauline Frederick ou dans Lucky Sam McCarver, il se sent prêt à partir à l'assaut de Broadway. A New York, un impresario l'adresse à Arthur Hopkins qui met en scène Machinal, pièce qui dénonce le caractère inhumain des grandes villes. Grâce à Louis Mac Loon, Clark obtient le rôle de l'amant de Zita Johann. Des quatre pièces qu'il joue à Broadway, seule Machinal rencontre le succès. Cependant, un autre problème se pose au milieu théâtral : Broadway vit une période difficile entre 1925 et 1930, les spectateurs se montrant de plus en plus exigeants sur la qualité des pièces qu'ils ont envie de voir. Ils sont maintenant à la recherche de choses vraies et d'interprètes faits de chair et os, entêtés et audacieux mais joyeux. Bien que Clark corresponde plutôt bien aux nouveaux critères du public, il n'est pas le seul. James Cagney, Humprey Bogart, Spencer Tracy, Robert Montgomery ou encore Fredrich March sont des rivaux de taille dans la course aux bons rôles et c'est la raison pour laquelle Clark se retrouve régulièrement au chômage, se demande souvent si tout cela en valait vraiment la peine, si au lieu de persévérer dans une voie à l'issue incertaine, il ne devrait peut-être pas se tourner vers un emploi stable.
Parfois en tournée entre deux pièces, tandis que Josephine s'occupe de son école de Los Angeles, Clark se surprend à pouvoir voler de ses propres ailes. Durant l'une de ses tournées, à Houston, au Texas, il rencontre la millionnaire Ria Langham. Plusieurs fois divorcée, veuve d'un actionnaire de la Texaco, femme d'argent, mère de deux enfants, elle est de dix-sept ans son aînée. Elle suit Clark pour son retour à New York. Comme d'autres avant elle, elle prend en main sa carrière. Influente, elle peut lui ouvrir des portes.
A Clark déjà très soucieux de son apparence, Ria enseigne les secrets du dernier chic new-yorkais. Elle améliore encore ses manières et l'introduit dans la bonne société. Cette éducation influencera à jamais Clark.
Après avoir vu Spencer Tracy dans la pièce The Last Mile, mélodrame à effets retraçant l'évasion d'un groupe de prisonniers, Ria décide que le rôle du méchant Killer Mears est fait pour Clark. C'est elle qui fut à l'origine de la reprise de la pièce à Los Angeles le 6 juin 1930 et qui s'arrange pour que son protégé obtienne le rôle. Clark fait un remarquable criminel, les critiques l'encensent. Les producteurs du cinéma, à la quête de nouveaux talents avec l'arrivée du parlant, sont aux aguets...
Lionel Barrymore qui est allé voir Clark dans The Last Mile est très impressionné par les progrès qu'il a fait (Lionel Barrymore et Clark avaient travaillé quelques années plus tôt ensemble au théâtre). Il s'arrange pour lui faire tourner un bout d'essai pour les studios de la Metro pour un film qu'il comptait mettre en scène : Never The Twain Stall Meet . Le bout d'essai est un échec, le film de Barrymore ne verra de toute façon jamais le jour. Néanmoins, d'autres bouts d'essais attendent Clark. Ainsi, Darryl Zanuck le teste pour Little Caesar (Le Petit César, 1930) mais ne signe pas de contrat avec lui à cause de la taille de ses oreilles. Minna Wallis, impresario et soeur du producteur Hal Wallis, voit le bout d'essai soit disant raté et est impressionné. Elle conduit Clark à la Pathé où l'on était en train de distribuer les rôles pour un western à budget moyen : The painted desert (Le Désert rouge, 1931). Sur l'assurance de Minna Wallis que Clark est excellent cavalier, on lui confie le rôle du traître pour 750 dollars par semaine. Heureux mais inquiet car il n'est jamais monté à cheval, Clark prend des leçons intensives d'équitation. Du film, on ne retiendra que la présence de Clark où il met déjà à profit ses tics d'acteurs qui allaient très vite devenir célèbres.
Après la Pathé, Minna Wallis persuade William Wellman de faire jouer Clark avec Barbara Stanwick et Ben Lyon dans Night Nurse (L'ange blanc, 1931) de la Warner. Il joue le rôle d'un chauffeur assez brutal. Etrangement, ce film plutôt médiocre n'est pas distribué jusqu'à ce que Clark se fasse remarquer dans une production de la MGM, plus tard, la même année.
L'intérêt suscité par cet inconnu amène la Metro à lui confier un petit rôle dans The easiest way (Quand on est belle, 1931), film conçu pour Constance Bennett. Clark y est blanchisseur. Son nom est perdu dans le générique mais les studios furent assaillis de demandes de renseignements sur le beau blanchisseur. Il enchaîne ensuite avec The secret six (Tribunal secret, 1931) aux côtés de Wallace Beery et Jean Harlow. La scénariste de The secret six, Frances Marion, remarque d'emblée le fort potentiel de Clark et demande à son mari, George Hill, producteur du film, de lui donner un rôle plus important que celui qui était initialement prévu pour Clark.
Fin 1930 - début 1931, la Metro se vante d'avoir chez elle "plus d'étoiles qu'il n'y en a au firmament" et Irving Thalberg fait signer à leur jeune étoile un contrat de deux ans renouvelables tous les six mois, avec un salaire de 350 dollars par semaine. Pour la première fois de sa vie, à plus de trente ans, Clark peut enfin compter sur un revenu fixe pendant une période de six mois minimum. Les studios lui payent aussi le complément de ses frais dentaires et une opération de chirurgie esthétique pour ses oreilles.
La première personne qu'il informe de son succès naissant est Franz Dorfler, son ex fiancée. Toutefois, soucieux quant à son avenir et hanté par la pauvreté passée, il est d'une excessive pingrerie.
En même temps, Josephine Dillon accepte le divorce. L'union de Clark et Josephine n'aura pas été très heureuse, leur couple se résumant plus à des rapports élève/professeur. "Clark m'a fait franchement part de son désir d'épouser Ria Langham parce qu'elle avait des moyens financiers supérieurs aux miens et pourrait l'aider. Il est difficile à vivre car sa carrière et son ambition passent avant tout le reste.
Josephine ne demande pas de pension alimentaire et le tribunal ne lui en accorde pas. Néanmoins Clark prend à sa charge le reliquat de ses dettes de son école d'arts dramatiques.
Ria Langham devient la deuxième Madame Clark Gable à New York le 30 Mars 1930, un jour avant que le divorce d'avec Josephine ne soit prononcé. Bigame par accident, Clark se voit obligé de se marier une seconde fois avec Ria, en Californie, le 19 juin 1931.
Entre temps, la Metro avait prêté Clark à la First National pour interpréter un rôle de gangster dans The Finger Points. Très vite, la presse remarque le potentiel de Clark et un journaliste écrit qu' "une grande vedette est en train de naître". La MGM semble toutefois peu se préoccuper des critiques nettement favorables de la presse en confiant à sa future star le rôle d'un membre de l'Armée du Salut dans le mélodrame moralisateur : Laughing sinners (La Pécheresse, 1931). Carl Loomis, le personnage interprété par Clark, sauve l'âme d'Ivy Stevens (Joan Crawford), pécheresse invétérée. C'est une erreur de distribution que de lui confier ce rôle de jeune premier romantique, le premier de sa carrière d'ailleurs ; Clark est alors à l'opposé de l'amoureux tendre que demande le scénario, incarnant davantage le séducteur primaire à la sensualité agressive.
Le film qui suit s'intitule The Free Soul (Ames libres, 1931). L'un de metteurs en scène, Clarence Brown, décide qu'ici Clark malmènerait Norma Shearer dans quelques séquences. Il campe ainsi pour la première fois son personnage de séducteur cynique. En pleine période de crise économique, les spectateurs apprécient ce genre d'homme qui ne fait pas le joli coeur avec les femmes. Lionel Barrymore obtient un oscar pour son rôle dans The Free Soul mais celui dont on se souvient et qui marque les esprits c'est Clark qui ouvre déjà la voie à d'autres héros tels Cagney, Bogart, Garfield ou encore Raft. Norma Shearer dira plus tard : "c'est Clark qui a rendu les brutes populaires.
Avec douze films la même année, Clark ne passe plus inaperçu, c'est une vedette. Il eut la chance de se trouver là au bon moment, d'avoir une once de talent et un chef de publicité fit le reste. Ce chef de publicité, c'est Howard Strickling. Il jouera un rôle essentiel tout le long de la vie de Clark, ils deviendront de grands amis. Responsable des relations avec la presse, Howard savait tout ce qu'il y avait à savoir sur Clark, choisissant de le divulguer ou de le taire selon qu'il jugeait le moment opportun ou non.
Grâce à Howard Strickling, Clark fut salué en 1931 comme la personnalité la plus marquante de Hollywood. On ne peut le comparer avec personne d'autre, curieux mélange de force suave et brutale à la fois.
Red Dust (La Belle de Saïgon, 1932) est le grand succès de Clark en 1932. Jean Harlow est pour la deuxième fois sa partenaire. Leurs scènes d'amour sont percutantes, la sensualité d'Harlow égalant celle de Clark. Une scène où il la découvre en train de prendre son bain va même jusqu'à choquer le public de l'époque. Clark et Jean tourneront ensemble dans quatre autres films. Le dernier, Saratoga (1937), ne pourra être achevé par Harlow qui mourut d'une crise d'urémie à l'âge de 26 ans.
Peu après Red Dust , la Paramount emprunte Clark pour une comédie un peu osée : No man on her own (Un mauvais garçon, 1932) avec Carole Lombard, "ex-baigneuse" chez Mack Sennett et épouse de l'acteur William Powell.
Moins de deux ans après ses débuts au cinéma, Clark signe un contrat de sept ans avec la Metro moyennant 2 500 dollars par semaine et qui grimpe à 4 000 dollars par semaine à partir de 1935, établissant ainsi un record.
Si son salaire et son statut social s'améliorent, il n'en va pas de même avec la qualité de ses films. Clark se plaint d'être cantonné dans le même genre de rôles de "brutes". Les gens en ont plus qu'assez de me voir malmener des femmes antipathiques. Et moi aussi, j'en ai assez . Sur son refus d'interpréter un nouveau rôle de gigolo selon ses propres dires, les directeurs de la Metro décident, par mesure de rétorsion, de le prêter à la Columbia chez qui Franck Capra prépare une comédie : It Happened one night (New-York Miami, 1934). Clark doit avoir pour partenaire Claudette Colbert, elle aussi "prêtée" pour des raisons analogues, par la Paramount.
A la surprise générale, y compris la sienne, Clark remporte l'oscar du meilleur acteur pour sa prestation dans la scène du motel où Claudette est à l'abri de la pluie mais pas de lui... On dit qu'il est alors à l'apogée de son art. Décontracté et désinvolte, il cadre parfaitement avec son personnage et l'histoire dans laquelle il rencontre une riche héritière en fugue et avec qui il voyage en autocar puis en autostop depuis New-York jusqu'à Miami.
Le film reçut également quatre autres oscars dans les catégories les plus prestigieuses.
Le succès de It Happened one night permet à Clark de se voir distribuer des rôles plus variés. L'année suivante, en 1935, il interprète magistralement le rôle de Fletcher Christian dans Mutiny on the Bounty aux côtés de Charles Laughton et de Franchot Tone. Mutiny on the Bounty est sacré meilleur film de l'année et Clark est cité au palmarès des meilleurs acteurs, s'ouvrant de nouvelles perspectives en tant qu'acteur dramatique. Il avait dans un premier temps refusé le rôle, incapable, croyait-il, de prendre l'accent anglais et se sentant d'avance ridicule en devant adopter la tenue d'époque et la queue de cheval. C'est Irving Thalberg, décédé l'année suivante, qui l'avait convaincu d'accepter. Finalement, Clark citera Mutiny on the Bounty comme l'un de ses films préférés, si ce n'est son film préféré : "Je m'étais trompé. C'était quelque chose de solide et de consistant, une page de l'histoire ; le thème est la lutte qui oppose de vrais hommes, sans l'ingrédient sentimental et romanesque typique du cinéma."
Avec la succession rapide de ces deux gros succès que sont It Happened one night et Mutiny on the Bounty, Clark est plus que jamais assailli par les fans qui vont parfois jusqu'à de telles extrémités qu'il a bien du mal à comprendre un tel engouement. "Ce fameux pouvoir que, paraît-il, j'ai sur les femmes, personne ne l'a jamais remarqué quand je jouais à Broadway. J'ignore quand il m'est venu, et je suis bien incapable de l'expliquer."
A la même époque, il devient évident que Clark et Ria ne sont pas faits l'un pour l'autre. On lui connaît plusieurs amantes dont Joan Crawford et Loretta Young, sa partenaire dans Call of the Wild (1935), relation de laquelle naîtra une fille illégitime : Judy Lewis. Toutefois, bien que Clark et Ria se séparent en novembre 1935, cette dernière n'est guère disposée à divorcer dans l'immédiat. Il faudra, pour cela, qu'il paye le prix de sa liberté...
Hormis Ria, Clark n'a plus aucune famille hormis son père avec qui quelques liens se sont renoués ces dernières années. Il s'installe d'ailleurs à Hollywood mais bien qu'en bons termes, William Gable campe sur ses positions concernant "ces gens du spectacle bizarres et mal élevés" . Il ne les comprend pas et ne les comprendra jamais. Il ne cesse de taquiner son fils : "Pourquoi ne lâches-tu pas ce métier idiot, fiston ? Nous retournerons chercher du pétrole et on deviendra riche en travaillant ensemble, comme avant. Tu te sentiras de nouveau un homme, fiston, dès que tu auras repris un métier d'homme" ; qui n'entendra jamais un seul mot d'éloges sur ses choix et sa carrière de la part de William.
En 1936, Clark se voit offrir le rôle de Blackie Norton dans San Francisco (1936) avec Spencer Tracy et Jeannette MacDonald, actrice de comédie musicale. Le thème évoqué est le séisme qui ravagea la ville de San Francisco en 1906. Il s'agit du premier film catastrophe de l'histoire du cinéma avec la mise en place d'effets spéciaux jamais encore réalisés. Le film marche bien mais plus grâce à la prestation de Tracy que celle de Clark selon les critiques et Clark lui-même qui envie son partenaire d'être capable de jouer n'importe quel rôle avec conviction.
C'est peut-être pour cela qu'il joue dans Parnell (1937), un rôle tout à fait différent, celui d'un patriote irlandais, poète. Ce rôle est cependant totalement inadapté à la personnalité de Clark, c'est un fiasco. Ce personnage inhabituel a bien failli mettre fin à sa carrière, les fans sont mécontents. C'est toutefois le seul véritable échec qu'on recense de ses trente années de présence au cinéma.
C'est également en 1937, quelques mois après avoir laissé ses empreintes dans le ciment du célèbre théâtre chinois de Sid Grauman, qu'une Anglaise l'accuse d'être le père de sa fille de treize ans prénommée Gwendolyn. Il se serait soit-disant rendu en Angleterre dans les années 1922 - 1923 sous un nom d'emprunt et se serait fait passer pour un précepteur. Il s'agit évidemment d'un mensonge mais encore faut-il le prouver devant le tribunal. Franz Dorfler, son ex fiancée qu'il n'a revu depuis sept ans maintenant, témoigne en sa faveur : ils étaient à l'époque tout deux en Oregon. L'accusatrice est finalement inculpée pour diffamation. Pour remercier Franz Dorfler de l'avoir soutenu, Clark l'a faite engager dans la troupe théâtrale de la Metro.
Les années se suivent, les films s'enchaînent : Test Pilot (Pilote d'essai, 1938), Too Hot to Handle (Un envoyé très spécial ,1938), Idiot's Delight (La Ronde des Pantins, 1939) et le succès est toujours au rendez-vous durant cette deuxième moitié des années 30. En outre, depuis janvier 1936, Clark fréquente Carole Lombard, brillante comédienne à l'écran comme à la ville. Plusieurs femmes ont aidé Clark, Carole Lombard lui apporte le bonheur qu'il recherche. Cependant, Ria réclame toujours une somme trop importante à son mari pour autoriser le divorce si bien qu'il se voit contraint de rester marié avec elle jusqu'en mars 1939. Durant cette période, la relation extraconjugale qu'il partage avec Carole alimente les scandales, ce qui lui voudra les remontrances de Louis B. Mayer, directeur de la MGM. Ce dernier souhaite impérativement que Clark mette de l'ordre dans sa vie privée pour l'image de la firme, signifiant au passage à l'acteur qu'il est lié à la MGM par un contrat comprenant des clauses de moralité.
Dans ces temps-là, David Selznick (dont les ennuis professionnels et les démêlés familiaux compremettent ses relations avec les grands studios) vient le voir pour lui proposer d'incarner Rhett Butler dans le futur Gone with the wind, vaste épopée de la guerre de Sécession. Dans un premier temps, Clark refuse, pensant ne pas correspondre au Rhett Butler que tout le monde connaît au travers du roman de Margaret Mitchell et que tout le monde attend. En outre, il garde en mémoire l'échec de Parnell. Carole le poussant à accepter ce rôle, la production affirmant qu'elle l'aiderait à divorcer de Ria Langham sur un plan financier et Selznick se montrant très insistant, il finit par accepter.
Ainsi, il peut effectivement divorcer et se remarier moins d'un mois après avec Carole, en secret pour échapper à la presse. Ce mariage ne surprit personne, ils étaient quasiment inséparables depuis les trois dernières années.
A propos du prix qu'il dut payer à la Metro pour emprunter Clark (le monopole de la distribution et la moitié des recettes brutes sont cédés par Selznick à la société de Mayer, celui-ci réalise de cette façon la transaction la plus rentable de toute l'histoire de la Metro, sans que Clark n'en profite plus qu'il touche toujours ses 4 000 dollars hebdomadaires habituels), Selznick déclara : "Le jeu en valait la chandelle. Je ne connais pas un seul acteur qui aurait pu incarner Rhett Butler aussi bien que lui. Dans n'importe quel rôle, Clark s'est toujours révélé convaincant. Il possédait ce don divin : un tempérament de théâtre, l'art de communiquer avec le public ; ce sont des choses qui ne peuvent pas s'apprendre ; l'expérience ne fait que les mettre un peu plus en valeur. Sans cette qualité, point de vedette. Etre photogénique ne suffit pas ; il faut ce quelque chose d'indéfinissable que je me flatte de déceler immédiatement chez un individu. La première fois que Clark Gable est monté sur scène, le public ne s'y est pas trompé.
Après un tournage de six mois, Gone with the wind, annoncé comme le film le plus prestigieux jamais réalisé et le plus long encore jamais tourné, remporte un franc succès avec plus de 25 millions de spectateurs dans les six mois qui ont suivi sa sortie. Clark restera à jamais célèbre grâce au rôle de Rhett Butler qui lui vaudra une troisième nomination aux oscars. Malheureusement, malgré les dix Oscars que remporte Gone with the wind en 1940, la statuette échappe de peu à Clark, au profit de l'Anglais Robert Donat cette année-là.
Malgré tout, il est l'un des seuls acteurs à avoir joué dans trois films ayant obtenu un oscar du meilleur film.
Dans sa vie personnelle, son mariage avec Carole est l'épisode le plus heureux. Ils partagent ensemble des plaisirs et loisirs simples, loin de la foule. Ils apparaissent comme le couple le plus heureux d'Hollywood. Carole va même jusqu'à abandonner l'univers des nights-club dont elle raffolait au profit d'une vie plus calme, proche de la nature. Ils s'installent dans un ranch à Encino, à 45 minutes en voiture de Beverley Hills. Ils désirent avoir des enfants.
Au début des années quarante, l'acteur confirme son statut de superstar mondiale. Il tourne auprès de Hedy Lamarr et Spencer Tracy dans Boom Town (La Fièvre du pétrole, 1940), de Rosalind Russell dans They Met in Bombay (L'Aventure commence à Bombay, 1941) et de Lana Turner dans Honky Tonk (Franc Jeu, 1941). Cependant, un terrible choc viendra contrarier cet état de grâce...
Le 7 décembre 1941, l'aviation japonaise attaque la base américaine de Pearl Harbor. Le 10, les Etats-Unis entrent dans le second conflit mondial.
En janvier 1942, Carole entame une tournée pour l'emprunt de guerre. On dit qu'elle hésite à partir car Clark s'intéresserait à une autre actrice (On parle de Lana Turner avec qui il tourne à l'époque). Pressée de le revoir, elle rentre en avion et non en train. Son avion disparaît près de Las Vegas. Clark se rend sur les lieux, les recherches commencent. Il n'y a aucun survivant. Nous sommes le 16 janvier 1942, Carole avait 33 ans et s'était mariée moins de trois ans auparavant... Clark se sent coupable de sa mort. Présidant le comité d'emprunt, il l'avait encouragée à partir.
"Pendant plusieurs mois après la mort de Carole, Clark était comme fou de chagrin" note l'écrivaine Angela Rogers Saint Johns, une amie intime qui rend souvent visite à Clark pendant son deuil. "Je le trouvais chez lui, dînant seul dans la salle à manger, avec, pour seuls compagnons, le chien de Carole et ses chats siamois. Il refusa de changer quoique se soit dans sa chambre qui resta exactement comme elle l'avait laissée. Quand je lui demandais pourquoi ne sors-tu pas ? Pourquoi ne téléphones-tu pas à tes vieux amis, Vic Fleming par exemple ? il répondait simplement : c'est toujours Carole qui appelait quand nous avions envie de sortir.
Malgré son immense chagrin, Clark s'occupe de la famille d'Otto Winkler, employé de la MGM, lui aussi tué dans la catastrophe. Il participe lui-même à l'achat d'une maison pour la veuve du publiciste.
Au deux tiers du tournage de Somewhere I'll find you (Je te retrouverai, 1942), Clark disparaît quelques semaines, l'équipe se demandant s'il reviendrait terminer un jour le film. Mais Clark est bien trop consciencieux pour avoir imaginé, ne serait-ce qu'un instant, pareil abandon. Il mènera le film à son terme tout en prévenant dès le premier jour de la reprise du travail qu'une fois Somewhere I'll find you achevé, il arrêterait sa carrière pour rejoindre l'armée de l'air, malgré son âge, en la mémoire de Carole.
L'armée de l'air en temps de guerre n'est pas l'endroit idéal pour un mari de 41 ans en deuil. Mais Clark, fort éprouvé, s'est mis à boire. Il souhaite échapper à son passé en prenant un nouveau départ.
A son arrivée à la caserne en août 1942, il déclare : "Je ne veux ni faire des discours, ni vendre des bons d'emprunts, ni distraire les soldats. Je veux seulement devenir mitrailleur sur un bombardier et être envoyé là où on se bat." Cependant, pendant sa formation, l'anonymat qu'il recherche lui ait refusé, assailli par des admirateurs lors de ses déplacements et poursuivi par les journalistes.
Sa formation terminée grâce à sa détermination et de longues nuits blanches à étudier, il devient bombardier aérien malgré sa peur des avions. L'armée le charge, dans un premier temps, de produire des films de propagande où il figure. Entouré de jeunes soldats qui risquent leur vie chaque jour, il supporte mal son régime de faveur et se porte volontaire pour des missions en Allemagne. En tant que vedette préférée d'Hitler, une importante récompense est offerte à qui le capturera. Fort heureusement, avant que quelqu'un n'y parvienne, le commandant William Gable est rendu à la vie civile, paré de la Distinguished Flying Cross et de la médaille de l'air, en 1944. Il retourne alors à Hollywood, sans certitudes sur son avenir.
Ses états de service lui valent une admiration et un respect accru du public. Des foules entières se déplacent pour l'accueillir à son retour. Si on en croit Eddie Lawrence, agent de publicité de la Metro : "Richard Coeur de Lion ne fut pas mieux reçu au retour des Croisades"
Clark a changé, la réadaptation est difficile pour lui. De plus, Carole lui manque toujours cruellement. Il a vécu les dures réalités de la guerre et est gêné de retrouver ce monde artificiel où les critiques de revues l'encensent. Mais, il supporte tout avec patience. Son premier film au retour de la guerre est la production Adventure (Aventure, 1945) avec Greer Garson. Comédie ennuyeuse, ce n'est un succès financier que parce que tout le monde attendait le retour de Clark sur les écrans. La campagne de lancement du film proclame : "Gable est de retour et c'est Greer Garson qui l'a conquis." Mais, on est là très loin de la vérité. Emile Torchia qui s'occupe de la publicité de Adventure déclare : "Gable et Greer Garson n'ont jamais accroché. Il la regardait comme si elle n'existait même pas. Il avait fait la même chose avec Jeannette MacDonald dans San Francisco. En présence de femmes vibrantes de sensualité, comme Jean Harlow, Ava Gardner ou Lana Turner, Gable restait lui-même, un séducteur plein de charme, mais avec les autres il était capable de rester de marbre.
Sur la lancée de ses succès d'avant-guerre, Clark tourne pour la Metro toute une série de films médiocres ; mais c'est surtout sur le plan personnel que les choses se présentent mal. Son élan et sa bonne humeur d'antan semblent quelque peu jouer aux abonnés absents, son chagrin est toujours présent. En outre, le traumatisme de la guerre et la mort de son père le poussent à bout. A bout de nerfs, il tremble souvent devant la caméra ; il se remet à boire et commence à manger plus que de raison, au détriment de sa santé. Son regard semble refléter toute sa tristesse. Il est très solitaire. Hormis quelques voyages en Europe, la vie n'est plus qu'un train-train routinier. Il enchaîne bon nombre d'aventures sans lendemain. A cette époque, il a également un accident de voiture en conduisant quelque peu éméché et est victime d'une arrestation injuste pour violation des lois réglementant la chasse, épisode qui affecte profondément son amour-propre de sportif qu'il était.
Le 21 décembre 1949, Clark, émoustillé par de nombreuses coupes de champagne, commet une terrible erreur quand il se marie pour la quatrième fois avec Sylvia Hawkes, alias Lady Ashley, une blonde sophistiquée et cosmopolite. Lady Ashley, déjà mariée trois fois (elle a d'abord épousé le fils du comte de Shaftbury dont elle garda le titre de Lady, puis l'acteur Douglas Fairbanks. A sa mort, en 1939, elle s'est empressée de se marier avec le baron Stanley of Alderly d'avec qui elle divorça en 1948), ressemble à Carole Lombard mais physiquement seulement. Trois semaines après la cérémonie, Clark comprend que c'est une erreur, le mariage ne durera pas deux ans. Lady Ashley est gentille mais, très vite, le snobisme dont elle fait preuve et son manque de goût pour la vie au grand air l'opposent à Clark. Elle demande le divorce en 1951, accusant le fantôme de Carole d'être toujours présent entre Clark et elle. De son côté, Clark avait déjà introduit une demande de divorce à Reno dans le Nevada où il s'était fait domicilier, faisant transporter là-bas un maximum de ses biens afin d'échapper à la législation californienne qui privilégie beaucoup les femmes. En avril 1952, le divorce est prononcé, largement en faveur de Lady Ashley qui retourne au bercail de l'aristocratie européenne, non sans avoir bien amélioré sa situation financière.
Le 22 juin 1951, Dore Schary, scénariste engagé à la Metro en 1933 puis nommé chef de la production en 1948, remplace Louis B. Mayer à la tête de la MGM. Schary est confronté à deux problèmes : réduire les frais de fonctionnements des studios et produire de meilleurs films. La solution choisie ? Rendre leur liberté aux membres de la Metro. Les premiers à partir sont des gens comme Mickey Rooney ou Judy Garland, connus pour leur mauvais caractère.
Aussi, le contrat de Clark s'achevant en 1954 ne sera pas renouvelé. Bien que toujours adulé du public, son salaire de 520 000 dollars par an est jugé trop élevé. Ce non renouvellement de contrat n'est pas plus mal pour Clark, la MGM a tellement changé qu'il ne s'y sent plus à sa place.
Après son départ, ses deux derniers films pour la Metro : Mogambo (1953) et Betrayed (Voyage au delà des vivants, 1954) sont distribués. Mogambo, remake de Red Dust avec Ava Gardner et Grace Kelly, rapporte de telles recettes que la Metro tente de faire revenir Clark mais c'est hors de question. On dit qu'il envoie son agent sonder la Metro pour voir ce qu'elle est prête à offrir pour qu'il tourne un film et ce, dans l'unique but, de décliner ensuite la proposition.
Du jour au lendemain, Clark se retrouve donc acteur indépendant et quel acteur indépendant : il est le plus cher de toute l'industrie cinématographique. La 20th Century Fox est la première à lui faire signer un contrat. Moyennant un pourcentage sur les recettes brutes, il tourne deux films pour cette firme en 1955 : Soldier in Fortune (Le Rendez-vous de Hong-Kong) avec Susan Hayward et The Tall Men (Les Implacables) avec Jane Russell. Ces deux films d'actions bien rythmés contribuent à rétablir son image de marque.
En même temps, âgé de 54 ans, il tombe amoureux et se marie le 7 juillet 1955, pour la cinquième fois, avec Kathleen Williams Spreckels, une ancienne top-model déjà mariée trois fois. Kay a connu Clark en 1935 mais voyant ses espoirs déçus avec lui à cette époque, elle épousa Adolph Spreckels Jr dont elle aura deux enfants.
Clark est attiré par Kay à cause de la similitude de leur passé. Elevée à la campagne, elle eut une brève carrière d'actrice et connaissait bien le monde du cinéma. Blonde et charmante, elle aimait la nature et savait qu'elle ne pourrait jamais remplacer Carole. Après plusieurs années d'une vie un peu vide, Clark ressentait le besoin d'être entouré d'une famille.
A la suite de leur union, la vie à Encino est à nouveau sereine. Clark s'occupe des enfants de Kathleen comme des siens et Kay, de son côté, n'a d'autre ambition que de rendre son mari heureux. En 1956, Kay fait une fausse couche alors qu'ils espèrent la venue d'un enfant.
Professionnellement, après son expérience bénéfique à la 20th Century Fox, Clark décide de produire lui-même ses films afin d'augmenter sa part de profit. Il fonde la compagnie GABCO et tourne The King and Four Queens (Un roi et quatre reines, 1956) avec Eleanor Parker. Le film, un western, ne remplit pas les espoirs que Clark avait placés en lui. Aussi, guéri de jouer les producteurs, il signe avec la Warner pour Band of Angels (L'esclave libre, 1957) avec Yvonne de Carlo et Sydney Poitier.
Après Band of Angels, Burt Lancaster, un acteur devenu producteur, persuade Clark de coproduire et de partager avec lui la vedette de Run Silent Run Deep (L'Odyssée du sous-marin Nerka, 1957), un film de guerre bien conçu et bien mené. Ensuite, la Paramount l'engage pour trois comédies : Teacher's Pet (Le Chouchou du professeur, 1958) avec Doris Day, But Not for Me (La Vie à belles dents, 1959) et It Started in Naples (C'est arrivé à Naples, 1960) avec Sophia Loren.
Clark commence à peine le tournage de It Started in Naples que le producteur Frank Taylor lui adresse un exemplaire du scénario d'Arthur Miller, The Misfits, sorte de western contemporain. Taylor désire confier le rôle du personnage principal à Clark et s'en expliqua plus tard : "Nous disposons déjà d'une distribution prestigieuse : Marilyn Monroe, Montgomery Clift, Eli Wallach et Thelma Ritter ainsi que d'un excellent metteur en scène : John Huston. Et, à ma connaissance, un seul acteur, Clark Gable, était capable d'exprimer la nature mâle et virile du personnage principal. A cinquante-neuf ans, Gable restait l'image toujours incontestée de la virilité. Si Marlon Brando possède également cette qualité, seules les femmes y sont sensibles, alors que Gable est perçu de la même façon par les hommes et les femmes. C'est que Brando est un mélange de sexualité et de sensualité ; Gable, lui, n'a absolument pas ce côté sensuel, c'est d'emblée, par sa seule présence physique qu'il s'impose comme mâle."
Pour 750 000 dollars et un pourcentage sur les recettes, Clark signe pour The Misfits. Entre outre, si le tournage dure plus de quatre mois, il touchera 48 000 dollars par semaine supplémentaire. Les tergiversations de Marilyn Monroe occasionnent de tels retards que Clark empoche près de 1 250 000 dollars avant même que le film ne soit sorti.
Marilyn voit en Clark le père qu'elle n'a jamais eu. Ce dernier qui apprécie la jeune actrice tout en pestant contre son irresponsabilité dans le travail s'efforce de lui témoigner patience et gentillesse. Il supporte avec un humour parfois caustique les aléas du tournage mais cela n'empêche pas que le film soit pour lui une épreuve physique (il refuse d'être doublé, les températures dans le désert sont très élevées). Cependant, Clark est heureux, il va enfin avoir l'enfant qu'il a toujours désiré, sa femme étant enceinte. Il déclare que ce sera un garçon.
Clark considère The Misfits comme son meilleur film depuis Gone with the wind.
Quelques jours après la fin du tournage de The Misfits, le 16 novembre 1960, Clark meurt d'une crise cardiaque à Los Angeles, âgé de 59 ans. Il avait un début de maladie de Parkinson les dernières années de sa vie.
Après les honneurs militaires, son corps fut inhumé au Forest Lawn Memorial Park Cemetery à Glendale en Californie, auprès de son ancienne épouse Carole Lombard...
Pour Kay Gable, sa mort est la conséquence des contrariétés qu'il a endurées sur le tournage de The Misfits et son entêtement sans bornes à exécuter lui-même des prouesses physiques qu'il n'était plus en âge, ni en santé de faire.
Son seul enfant légitime naîtra le 20 mars 1961. Comme il l'avait prédit, c'est effectivement un garçon nommé John Clark Gable. En le voyant, Kay a dit : "Il est superbe, comme son père le voulait."
Depuis la mort de Rudolph Valentino, aucune autre vedette n'avait été aussi sincèrement pleurée que le fut Clark Gable. Il était connu dans le monde entier, qu'il l'avait vu aimer, sourire, se battre, souffrir... Sa démarche désinvolte, son humour et ses airs canailles étaient son image de marque. Sa mort laissa un vide que l'industrie du cinéma n'a jamais pu combler. Comme l'a écrit la journaliste Adela Rogers St Johns : "Le Roi est mort. Il n'a pas de successeur et n'en aura pas. Le titre est mort avec lui."
Entre 1957 et 1961, plusieurs grands noms du cinéma des années 30 et 40 ont disparus tels Ronald Colman, Gary Cooper, Tyrone Power, Errol Flynn et Humphrey Bogart mais c'est la mort de Clark, le "roi d'Hollywood", qui signa définitivement la fin d'une époque... Son étoile était montée au plus du firmament de la gloire où elle avait brillé plus longtemps que celle de n'importe quel autre grand nom hollywoodien. Personne au monde ne connut jamais, et de loin, une vie et une carrière aussi extraordinaires que la sienne. En conclusion, ainsi que le disait John Huston : "Ce n'est pas un homme, c'est une institution."